L'allusion à l'opposition de la France à toute modification des traités de l'Union européenne, qui font de Strasbourg le siège de son Parlement, a été perçue comme un signal fort. "Renégocier la question du siège dans les traités, ce serait comme ouvrir la boîte de Pandore. Personne ne souhaite remettre à plat les implantations de toutes les institutions européennes", observe Catherine Trautmann, vice-présidente de la communauté urbaine de Strasbourg et présidente de la délégation socialiste française au parlement européen.
"Le Parlement apporte de l'activité économique, mais il nous coûte aussi"
Au-delà du politique, l'enjeu à court terme est aussi financier : le prochain contrat triennal "Strasbourg, capitale européenne", qui fournira aux collectivités alsaciennes les ressources spécifiques à leurs missions d'accueil des institutions, est en suspens. Entre 2009 et 2011, l'enveloppe apportée par l'Etat (117,5 millions d'euros) avait servi à co-financer la construction du TGV Rhin-Rhône, à améliorer l'accessibilité aérienne de Strasbourg, et à construire une école européenne. Dans le prochain contrat, dont la signature par le ministère des Affaires étrangères se fait attendre depuis le 1er janvier, Strasbourg souhaite redorer son Palais des congrès et renforcer, toujours, les dessertes internationales de son aéroport.
"Le Parlement apporte de l'activité économique, mais il nous coûte aussi", reconnaît Catherine Trautmann. "Dans ce pays qui a un tropisme parisien, qui est très centralisateur, notre situation de ville de province avec un rôle de capitale européenne est étrange. Les gouvernements français ont trop souvent pensé que la bataille du siège était perdue d'avance".
"Que l'Europe s'occupe d'abord du retour de la croissance !"
Fabienne Keller, sénatrice (UMP) du Bas-Rhin, entend faire cause commune avec les socialistes. "Symboliquement, il faudra que François Hollande tienne encore cette année, à Strasbourg, un discours au retentissement européen", propose-t-elle. "Nous défendons une identité forte du Parlement, mieux ancrée à Strasbourg qu'à Bruxelles, où les messages des députés sont trop souvent confondus avec ceux du Conseil ou de la Commission", rappelle l'élue.
Pierre Loeb, lobbyiste de l'Association européenne des jeunes entrepreneurs, propose un argumentaire optimiste. "Les anti-Strasbourg ne sont soutenus par aucun Etat. Politiquement, en temps de crise, les arguments de la campagne Single Seat ne portent pas le bon message. Que l'Europe s'occupe d'abord du retour de la croissance !"
Article paru dans Challenges, le 06.11.12
Rédigé par Olivier Mirguet